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samedi, 09 mai 2009

Icônes (Edinburgh 1)



La façon dont une peinture, surtout lorsqu’elle ne présente pas un intérêt artistique majeur, devient une icône est souvent un grand mystère.

Pourquoi der Arme Poet de Carl Spitzweg est-il le tableau le plus connu des Allemands ?

Pourquoi la Joconde est-elle quasiment devenue invisible en tant qu’œuvre, cachée qu’elle est derrière l’icône ?

Et comment se fait-il que le Patineur (portrait du révérend Robert Walker patinant sur le lac de Duddingston) de Sir Henry Raeburn, visible à la National Gallery of Scotland soit devenu l’emblème de l’art écossais ?






Source : Miquel Guifré - Galerie Flickr





Source : National Galleries of Scotland


Le cas du Patineur est d'autant plus intéressant que ce symbole de la peinture écossaise serait en fait l’œuvre d'un peintre français (Henri-Pierre Danloux, si l'on en croit une nouvelle brève de la Tribune de l'Art de mars 2005). Le moins que l'on puisse dire, c'est que cette information n'est pas disponible sur place !

jeudi, 14 juin 2007

Un trousseau de clef[s]

Depuis quelques jours, mon blogue reçoit régulièrement des visites en provenance de ce billet de Monsieur KA. Huitième note consacrée à la perspective, elle renvoie incidemment à un jeu et un mystère que j’avais proposés à mes lecteurs à mon retour de Londres en 2005.
Cet afflux soudain m’a rappelé un échange de messages avec Monsieur KA, dans lequel celui-ci me faisait part, au temps ancien où je figurais dans sa liste de liens, de son souhait de rédiger un texte autour des clefs. N’ayant rien vu venir, je me permets de lui griller la politesse, en proposant quelques rôles tenus par la clef en peinture.

L’idée étant partie du tableau de Jan Steen, La Leçon de clavecin, daté de 1660, toutes les illustrations seront tirées d’œuvres du XVIIème siècle.

La clef, en premier lieu, est présente en tant que clef (key is a key is a key is a key) permettant de fermer une porte (Ceci est une clef).

La porte d’une armoire dans le tableau de Pieter de Hooch, Intérieur avec deux femmes près d'une armoire à linge, peint en 1663


La porte d’un salon donnant sur un couloir dans Les pantoufles, toile de Samuel van Hoogstraten, datée vraisemblablement de 1658. L’ostentation du trousseau est plus marquée et n’est certainement pas innocente, en relation avec les pantoufles abandonnées.


La porte d’une prison, celle de Saint-Jean-Baptiste, dont la tête est remise à Salomé dans l’œuvre du Guerchin visible à Rennes (1657). Les clefs, brillant dans l’ombre au centre du tableau, ont permis l’ouverture de la geôle du saint, mais pour le livrer à son bourreau.


A mi-chemin entre le symbole et la réalité, les vaincus offrent à leur vainqueur la clef de leur cité.

Justin de Nassau remet ainsi les clefs de Breda à Ambrogio Spinola, dans le fameux tableau de Velázquez, Les Lances, peint en 1634.


S’éloignant du réalisme, les clefs de Saint-Pierre ouvriront les portes du Paradis aux âmes méritantes.

Au pied du tombeau vide de la Vierge, en pleine Assomption, chez Laurent de la Hyre (1635)


Au pied de la colonne de souffrance du Christ chez Murillo (1675)



Les vanités et les natures mortes sont avares en clefs. Leur rare présence offre pourtant matière à de profondes réflexions sur le temps qui passe, quand elles servent à remonter une montre, substitut au traditionnel sablier.

Au côté de la lampe à huile en train de s’éteindre, et du verre, fragile et renversé, la clef de la Vanité de 1630 de Pieter Claez représente tout à la fois l’espoir d’une perpétuation du mouvement de la montre, et de la vie, mais aussi la fragilité de cet espoir suspendu dans le vide à un petit ruban bleu.


Après ce moment de philosophie, le retour à Jan Steen est un peu trivial, car chez lui, et à plusieurs reprises, la clef a un caractère grivois.


Que ce soit le professeur de clavecin et sa jeune élève (1660), le vieux client et la jeune servante dans la taverne (1660), ou encore le oude vrijer et la jonge meid dans la cuisine (1665), nous sommes en présence d'un vieillard libidineux convoitant la virginité d'une demoiselle.


La clef ouvrira-t-elle la voie au vieil homme, ou protègera-t-elle la jouvencelle ? L'histoire ne le dit pas.







La clef dissimulée par Hoogstraten dans sa Vue d’un couloir (1662), et ses pièces en enfilades, est plus étrange.


En effet, accrochée à la colonne au premier plan, elle est presqu’invisible, et pourtant on ne voit qu’elle. Mais qu’ouvre-t-elle donc ? Point de vieillard libidineux à l’horizon pour la métaphore, point de porte, d’armoire ou de coffre !








Cependant, une demoiselle est bien là, accompagnée de deux messieurs (il s’agit presque d’une scène de Vermeer, vue de dos à travers la vitre). La clef et la volière ouverte laissent elles présager la suite de la scène ? Le petit oiseau va-t-il s’envoler ?









Enfin pour terminer ce tour de clefs, et ne pas laisser croire que seul le XVIIème siècle s’y est intéressé, voici un tableau de Fragonard, la Leçon de musique, sans vieillard, mais non sans trouble.




Mise à jour (20 juin) : il n'y a naturellement pas de clef dans le tableau original de Fragonard. C'est la clef de Steen qui a voyagé depuis la Wallace Collection !

19:15 Publié dans Peinture | Lien permanent | Commentaires (10)

vendredi, 08 juin 2007

Le Soleil et la Lune ont rendez-vous avec le Christ

La religion chrétienne a, dès ses débuts, intégré dans la liturgie un grand nombre des idoles et références culturelles préexistantes, même si elle en a combattu d’autres, à l’instar de l’ours qu’elle a fini par vaincre.
C’est ainsi que le soleil et la lune, imprégnant l’imaginaire de toutes les civilisations, ont été recyclés de diverses manières. La date de naissance du Christ a ainsi été fixée au voisinage du solstice d’hiver qui voit la renaissance du soleil. La vierge Marie, dans l’apocalypse de Jean, apparaît comme une femme enveloppée du soleil, la lune sous ses pieds, et une couronne de douze étoiles sur sa tête (Ap. 12-1).
Dans l’iconographie, le soleil ou la lune, portés par des anges symbolisent régulièrement la résurrection. A Chartres, les deux clochers portent à leur sommet, l’un, au nord, un soleil (le Christ), l’autre au sud, une lune (la Vierge).

Je n’avais en revanche jamais vu, jusqu’à présent, le soleil et la lune représentés en tant que personnages, tant cela me semblait relever du polythéisme.
C’est pourtant ce que l’on voit très clairement sur les peintures murales romanes, datées de la fin du XIIe siècle, de l’église Saint-Jacques-des-Guérets, sur la rive gauche du Loir, en face de Troo.


Le registre inférieur de la crucifixion est occupé classiquement par la vierge Marie et l’apôtre Jean (Femme, Voici Ton Fils, Fils Voilà Ta Mère), alors que le registre supérieur présente le soleil et la lune.
Les deux astres font le geste de se voiler la face devant la mort du Christ.
On notera cependant qu’aucune expression extérieure de la douleur n’apparaît dans cette scène, et qu’il s’agit plutôt ici de mettre le sacrifice de Jésus dans une perspective d’espérance de la résurrection et du salut de l’homme. Le dolorisme et la représentation du crucifié en tant que cadavre sont plus tardifs.


Sol



Luna

Survivance des cultes anciens du Soleil et de la Lune ? Liberté d’un artiste local ? Dans tous les cas, il s’agit d’une œuvre étonnante.

mercredi, 14 mars 2007

Hein ?

En prélude à l'exposition du Grand Palais consacrée, à partir du 28 mars prochain, au nouveau réalisme, une photographie prise dans le métro.


12:10 Publié dans Peinture | Lien permanent | Commentaires (1)

jeudi, 01 mars 2007

Remake

La visite de l’exposition « Orangerie 1934 : les Peintres de la réalité » m’a ravi, certes – voir une demi-douzaine de Georges de La Tour ne peut me laisser indifférent –, mais aussi passablement rendu perplexe, voire doublement perplexe.

Je ne me risquerai pas au ridicule de critiquer l’exposition de 1934, mais elle ne laisse pas d’entraîner de nombreuses interrogations.

Sur l’objet lui-même : qu’est donc que cette réalité dont il est question ? en quoi les verres de Stoskopff sont ils réels et ont-ils quelque chose à voir avec la réalité ? et la flamme du Songe de Joseph, est-elle réelle ? le caravagisme est-il un réalisme ?


Sur l’idéologie sous-jacente d’autre part : en effet, on ne peut pas manquer – les textes de l’exposition nous y incitent en parlant de « retour à l’ordre » – compte tenu du contexte du milieu des années trente, de penser à un « retour à la terre et au réel » face à un art moderne dérangeant (le cubisme et Duchamp sont déjà passer par là). Cela laisse une drôle d’impression.

Ensuite, on se demande bien quel est le propos de l’exposition de 2006-2007. Car enfin que voit-on, en dehors des grands panneaux avec trop de textes pour que l’on puisse les lire tranquillement dans la foule, même peu dense ? Des tableaux majoritairement en provenance du Louvre, beaucoup de tableaux prêtés par des musées de province et facilement accessibles (même Epinal !), pas mal d’œuvres médiocres ou secondaires dans l’œuvre de leurs auteurs (Le Lorrain, Le Nain, Valentin de Boulogne) et beaucoup de peintre eux-mêmes secondaires.


Je ne trouve pas cela suffisant, nonobstant la séduction intellectuelle de l'idée d'une réédition d'une exposition qui fut marquante à son époque ; mais un essai eut été suffisant (essai au sens d'ouvrage littéraire, bien entendu).

mardi, 20 février 2007

Au Louvre (une histoire de pont)

La présentation chronologique et par école nationale des collections de peinture du musée du Louvre présente l’intérêt, entre autres, de mettre en évidence les filiations, les constantes, les écarts, les singularités. A cet égard, ma visite dominicale confirme mon peu d’intérêt pour l’œuvre de Poussin, tout en l’inscrivant dans une même perspective d’indifférence à Le Sueur, Champaigne (sauf exception), David, Ingres (sauf exception encore une fois) et Bouguereau (mais là nous avons quitté le Louvre).

En revanche, Claude Gellée, dit Le Lorrain, me plaît de plus en plus. Je me suis arrêté cette fois ci devant David sacré roi par Samuel. Le pont franchit un cours d’eau (ou bien est-ce un étang ?) ; deux arches de pierre, une pile centrale, deux passerelles que l’on imagine en bois ; les montagnes bleuissent sur l’horizon, comme il se doit ; quelques barques circulent, ou accostent ; des silhouettes passent sur le pont.


Claude Gellée dit Le Lorrain - David sacré roi par Samuel (détail) - Musée du Louvre

Bien sûr, Le Lorrain a peint quelques ponts.


Claude Gellée dit Le Lorrain - Paysage avec bergers, le pont Molle (détail) - City art gallery of Birmingham

Mais le pont de David et Samuel me fait d'abord, et irrésistiblement, penser à un autre, dans le Louvre même, plus loin (non pas une vue de pont, mais un regard sur un pont).


Jean-Baptiste Camille Corot - Le Pont de Narni (détail) - Musée du Louvre

Une arche en plein cintre, deux piles en ruine ; l’influence est manifeste.

16:20 Publié dans Peinture | Lien permanent | Commentaires (2)

mercredi, 31 janvier 2007

Les figures de Poussin

Ceux de mes lecteurs qui me lisent depuis longtemps (enfin, longtemps sur une échelle de temps géoblogique) savent que naguère, j'appréciais peu la peinture française des XVIIe et XVIIIe siècles, et que si je suis désormais conquis par Le Lorrain, Poussin me résiste encore.
Je ne suis pas insensible cependant aux paysages avec personnage de celui-ci, comme les Quatre Saisons du Musée du Louvre, par exemple.

Aussi fus-je particulièrement intéressé par ce texte de Burattoni et Abrioux judicieusement installé dans le jardin intérieur du domaine de Coubertin à Saint-Rémy lès Chevreuse, en regard du jardin des bronzes et de ses visiteurs.


Il arrive que Poussin se fourvoie dans les figures qu’il insère dans ses paysages.
(montage photographique qui m'a demandé quelque effort)


L’œuvre de Buratoni et Abrioux constituait une partie de l’exposition temporaire Le spectre des jardin : l’art au jardin / le jardin comme art qui s’est tenue à la fondation du 13 septembre au 12 novembre dernier, et que nous avons visitée fin septembre. Le jardin des bronzes abrite (si l’on peut dire) une partie de la collection permanente, en particulier de nombreuses statues de Joseph Bernard, ainsi que des sculptures d’André Abbal, Jean Carton, Appel’les Fenosa, Pablo Gargallo, Etienne Hadju, Karel, Robert Wlérick.
Je dois bien avouer que la qualité assez médiocre de ces œuvres entraîne à penser qu’il y a bien fourvoiement quelque part. Le reste de la collection est disséminée dans le parc, ce qui a défaut d’occasionner de grandes émotions esthétiques, permet au photographe amateur de faire quelques clichés.







Mais revenons en à Poussin. Je ne sais pas à quels tableaux précisément fait référence la phrase de Buratoni et Abrioux, ni même si cette assertion est bien fondée sur une réelle observation de l’œuvre de Poussin. Quoiqu’il en soit, elle aura au moins eu le mérite de m’inciter à examiner de nouveau ses paysages (grâce notamment à la Web Gallery of Art).

Ma préférence pour Le Lorrain est confirmée. Je trouve que les figures de Poussin s’insèrent mal dans la composition : taille trop grande, couleur trop vive, le trait trop précis. Pourtant, il est d’usage de placer au plus haut Poussin dans la hiérarchie des paysagistes, en raison de sa plus grande intelligence, de sa grande culture et de sa pensée plus élevée.
Et bien pour ma part, cette intelligence, cette culture, cette pensée sont bien trop ostentatoires pour m’émouvoir. Alors que les paysages du Lorrain, comme je l’ai déjà écrit ici, tout en étant remarquablement et intelligemment construits (les personnages étant loin d’être simplement anecdotiques), laissent toute leur place à l’émotion et à la sensualité.

20:45 Publié dans Peinture | Lien permanent | Commentaires (2)

mardi, 22 août 2006

Un vert de Champaigne

Je n'apprécie guère Philippe de Champaigne. Il symbolise, pour moi, et avec d'autres, tous les défauts du classicisme français du XVIIème siècle : la pompe, la froideur, la rigidité, l'ennui. Lully plus que Charpentier, en quelque sorte.
Cependant, régulièrement, des morceaux de l'un ou l'autre de ses tableaux m'intéressent. Ainsi par exemple, l'ange de l'annonciation de Caen.


Annonciation - Philippe de Champaigne - Musée des Beaux-Arts de Caen


Il y a là un beau mouvement, une jolie lumière, un superbe vert (véronèse). Mais depuis ma visite à Caen, je ne peux m'empêcher de penser que j'ai déjà vu cet ange quelque part.
J'ai d'abord songé à la Lutte de Jacob avec l'Ange de Delacroix à Saint-Sulpice, mais, malgré un air de famille, ce n'est pas cela.


Quelqu'un aurait une idée ?

lundi, 21 août 2006

Das Jordangold



Le mariage de la Vierge - Le Pérugin - Musée des Beaux-Arts de Caen

Joseph vient d'être préféré à de bien plus jeunes et bien plus beaux prétendants. Il en est tout rougisseant, et sa verge fleurit.

Au centre théologique du tableau, l'anneau de l'union est invisible.

Mais la préoccupation du Pérugin est-elle vraiment le mariage de la Vierge ? Son sujet ne serait-il pas, en ce début du cinquecento, la perspective ?
Auquel cas, le centre du tableau est bien plutôt le paysage aux collines bleues s'encadrant dans l'enfilade des portes du temple.

Un vide entouré de plein ; un anneau, en quelque sorte.

vendredi, 18 août 2006

L’œil était derrière Abraham et regardait Caen

Regards croisés, offrande de pain, corps ployés.
Un seul oeil nous fixe, c'est celui du cheval blanc.
Vert, rouge, bleu ; cet œil est noir.
Noir aussi, le jeune esclave, seul à regarder Abraham de face.


Abraham et Melchisédech - Rubens - Musée des Beaux-Arts de Caen