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mercredi, 24 septembre 2008

Je ne sais pas... je suis perdu aussi

Un spectateur d’opéra des années 1930, voire des années 1950, serait très étonné en s’apercevant qu’aujourd’hui comprendre parfaitement tous les interprètes d’une œuvre en français est une chose si rare qu’elle en devient notable quand elle se produit.
C’est ce qui s’est passé pour Pelléas et Mélisande, donné jusqu’à très récemment au théâtre de la Monnaie à Bruxelles. Toute la distribution, y compris le non-francophone de l’équipe, a rendu de façon parfaitement intelligible et de bout en bout le très beau texte de Maeterlink, que l’on redécouvre à chaque fois avec émerveillement.


La forme inventée par Anish Kapoor (et magnifiquement éclairée), à l’intérieur et autour de laquelle tout se passe, évoque à merveille, et loin de toute littéralité, les lieux de l’action : fontaine, grotte, chambre…
D’un côté matrice originelle, à la fois accueillant et inquiétante, et de l’autre promontoire, escalier et passerelle, seuls éléments réalistes d’un décor abstrait, ultimes traces d’une présence humaine. La poésie et la beauté de cet objet tournant sur lui même sont stupéfiantes (et très en harmonie avec la musique de Debussy).

Face à cela, le metteur en scène (Pierre Audi) ne pouvait qu’abandonner toute référence au symbolisme et toute tentation réaliste (même modernisée). Il a même abandonné la longue chevelure de Mélisande, qui apparaît ainsi chauve au bord de la fontaine.
Tant vocalement que dramatiquement, chaque personnage est parfaitement caractérisé (mais pas toujours d’une manière traditionnelle), mais surtout laisse apparaître des failles et une personnalité plus complexe que les lectures habituelles ne nous les montrent.
L’inquiétude et l’angoisse sont omniprésentes, en particulier avec le jeu d’observation auquel jouent tous les personnages, mais surtout Golaud, tout le temps à l’affût autour de la scène, épiant Pelléas et Mélisande, et donc sachant tout dès le début.

Remarquable spectacle, qui incite à regarder de plus près la programmation du Théâtre de la Monnaie (j’ai déjà noté dans mes carnets deux autres propositions : Mort à Venise de Britten et le Grand Macabre de Ligeti).




21 septembre 2008 – Pelléas et Mélisande – Claude Debussy – Maurice Maeterlinck
direction musicale, Mark Wigglesworth - mise en scène, Pierre Audi – scénographie, Anish Kapoor – costumes, Patrick Kinmonth – éclairages, Jean Kalman - chef des chœurs, Piers Maxim
Pelléas, Stéphane Degout – Mélisande, Sandrine Piau – Golaud, Dietrich Henschel – Geneviève, Marie-Nicole Lemieux – Arkel, Alain Vernhes - Un médecin, Jean Teitgen - Un berger, Wiard Witholt – Yniold, Valérie Gabail
Orchestre symphonique et choeurs de la Monnaie