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lundi, 19 février 2007

Fins de l'histoire

La fin de l’histoire (The End of History and the Last Man – Francis Fukuyama) fut, autour des année 1990, une théorie qui fit florès, et qui fut fort débattue, annonçant l’avènement de la paix éternelle et universelle, par la démocratie et le libéralisme, après la défaite du communisme et de diverses autres dictatures (je simplifie certainement).

A la lecture de l’ouvrage de Jacques Le Goff, Les Intellectuels au Moyen-Age, entamée à l’instigation de Denis du blogue Inactuel, il apparaît que dès le XIIème siècle la prétention d’avoir atteint l’achèvement de l’histoire est affirmée par certains des plus brillants esprits du temps :

Dans le Haut Moyen Age l’histoire s’était arrêtée, l’Eglise devenue triomphante en Occident l’avait réalisée. Othon de Freysing reprenant la conception augustinienne des deux cités déclare : à partir du moment où non seulement tous les hommes, mais même les empereurs, à quelques exceptions près, furent catholiques, il me semble que j’ai écrit l’histoire non de deux cités, mais pour ainsi dire d’une seule, que je nomme l’Eglise.


Je lis ailleurs, mais toujours chez Le Goff (La civilisation de l’Occident médiéval) :

Porteuse de passion nationale, la conception de la translatio imperii inspire surtout aux historiens et aux théologiens médiévaux la croyance en l'essor de l'Occident. Ce mouvement de l'histoire déplace le centre de gravité du monde de l'Orient toujours plus vers l'ouest [...]. Othon de Freising écrit :« Toute la puissance et la sagesse humaines nées en Orient ont commencé à s'achever en Occident », et Hugues de Saint-Victor : « La divine Providence a ordonné que le gouvernement universel qui, au début du monde, était en Orient, à mesure que le temps approche de sa fin se déplaçât vers l'Occident pour nous avertir que la fin du monde arrive, car le cours des événements a déjà atteint le bout de l'univers. »


Jacques Le Goff évoque en une phrase, dans le même paragraphe des Intellectuels au Moyen-Age, Guizot « parvenu à la victoire politique de la bourgeoisie [qui] croira aussi avoir atteint la fin de l’histoire ».
Je citerai cette phrase d’Augustin Thierry, qui fait le lien entre les deux époques (préface à Histoire du Tiers Etat) : « C’est à ce point de vue [la monarchie de Louis-Philippe mettant fin à l’histoire], qui m’était donné par le cours même des choses, que je me plaçai dans mon ouvrage, m’attachant à ce qui semblait être la voie tracée vers l’avenir, et croyant avoir sous mes yeux la fin providentielle du travail des siècles écoulés depuis le douzième. »

Je n’évoquerai pas Alexandre Kojève, et encore moins Hegel, mes compétences en ces domaines étant particulièrement limitées, et je remonterai pour terminer à l’Apocalypse, qui annonce, au delà de la fin de l’histoire et des temps, la fin du temps, illustrée au portail royal de la cathédrale de Chartres par les anges dissimulant sous leur manteau un astrolabe, inutile instrument de mesure du temps, puisque le temps n’est plus.

dimanche, 18 février 2007

Une image de Chartres par semaine (30) - L'esprit du parvis

Les soirs d'hiver, le vent souffle autour de la cathédrale. Les esprits se hâtent de rentrer dans leur foyer de peur d'être emportés dans le froid par la bourrasque.
Mais où logent-ils ?

samedi, 17 février 2007

Visitation[s]

[Marie] entra dans la maison de Zacharie, et salua Élisabeth.
Dès qu'Élisabeth entendit la salutation de Marie, son enfant tressaillit dans son sein, et elle fut remplie du Saint Esprit.
Elle s'écria d'une voix forte : Tu es bénie entre les femmes, et le fruit de ton sein est béni.
Comment m'est-il accordé que la mère de mon Seigneur vienne auprès de moi ?
Car voici, aussitôt que la voix de ta salutation a frappé mon oreille, l'enfant a tressailli d'allégresse dans mon sein.

Evangile selon Saint Luc (1.40-44) Traduction Louis Segond 1910


Dans une église consacrée à Marie, et recelant des reliques aussi éminentes que le voile de la Vierge, qui aurait été porté, dit la tradition, lors de l’annonciation, il est somme toute normal que les épisodes principaux de sa vie soit représentés de nombreuses fois.
C’est le cas de la visitation, rencontre entre Marie et Elisabeth, alors enceinte de Jean-Baptiste, que l’on retrouve figurée depuis le XIIe jusqu’au XVIe siècle dans la cathédrale de Chartres.

L’anecdote est mince, et les sculpteurs et maîtres-verriers ont manifestement dû être confrontés à la difficulté de distinguer les deux femmes. Les solutions trouvées sont d’ailleurs variées.

Au XIIe siècle, le sculpteur du tympan méridional du portail royal a couronné Marie, ce qui n’est pas courant, voire anachronique (si l’on se place dans la cohérence du texte biblique et des traditions chrétiennes, bien entendu), dans un épisode évangélique.
L'on remarque aussi, mais il faut être très près pour le voir, qu'Elisabeth passe son bras autour de la Vierge, comme on le verra plus tard dans un vitrail, et que celle-ci est seule à être auréolée.

A la même époque, le verrier de la baie centrale de la nef, au verso de la façade ouest, est moins explicite. La Vierge se reconnaît cependant par les couleurs bleu et rouge de ses vêtements, auxquelles elle est souvent associée.

De son côté, Elisabeth est habillée de façon plus terne, et son visage, à défaut d’annoncer sa vieillesse, est marqué par des sourcils froncés.

Au début du XIIIe siècle, dans le déambulatoire sud, la distinction est encore plus difficile, n’était la présence d’une couronne sur une sorte de console au dessus du personnage de gauche, qui semble identifier Marie. D’autre part, le personnage de droite a une attitude d’accueil de sa visiteuse, qui indique qu’elle est probablement la maîtresse de maison, Elisabeth.

L’état de conservation du vitrail haut du transept nord ne permet guère de se prononcer sur l’identification de la Vierge et de sa cousine. Tout au plus, pourrait-on imaginer qu’Elisabeth, à droite, ouvre les bras pour accueillir Marie.

A la place d’honneur, dans l’axe du chœur, au centre d’une verrière qui vient d’être restaurée, entre une annonciation et une glorification, la visitation suivante resplendit de tous ses feux. C’est encore une fois l’attitude d’Elisabeth, à droite, passant son bras autour de Marie, qui permet de distinguer les protagonistes de la scène.


Revenant à la sculpture, mais restant au XIIIe siècle, c’est pour la première fois l’âge qui va signer la différence entre les cousines. En effet, ce sont ses traits marqués, autour de la bouche et des yeux, qui permettent de reconnaître, à droite, Elisabeth, au portail du transept nord.

A partir de cette époque, c’est la vieillesse d’Elisabeth (Car je suis vieux, et ma femme est avancée en âge Luc 1.18 Segond 1910) qui sera mise en scène, parfois jusqu’à la caricature, en particulier dans la peinture. Il en est ainsi de la visitation de la clôture du chœur, due au ciseau de Jean Soulas entre 1521 et 1535.

jeudi, 15 février 2007

10 affirmations, l'une d'elle est fausse

Sur la demande expresse de Zvezdo, qui connaît mon goût pour les chaînes et les questionnaires :

1- Je ne parle pas anglais
2- J’ai passé un heure au Mali
3- J’ai passé trois jours à Alger au milieu des fusillades
4- Je n’ai eu dans toute ma vie d’automobiliste que deux P.V., pour stationnement payant non réglé, alors que j’ai renversé un piéton sur un passage protégé devant un agent de police
5- J’ai été interviewé plusieurs fois par la télévision, la radio et la presse écrite
6- J’ai vu en concert Johnny Hallyday, Marcel Amont, Serge Lama et Joe Dassin
7- J’ai vu en concert Charles Trenet, Léo Ferré, Georges Brassens et Claude Nougaro
8- J’ai une bouteille de château d’Yquem et une bouteille de château Mouton-Rotschild dans ma cave
9- J’ai étudié dans une école nationale d’administration
10- J’ai lu Guerre et Paix à 13 ans (c'était peut-être 14 ans)

mercredi, 14 février 2007

23 Août - 22 septembre

La façade occidentale de la basilique de Saint-Denis, contemporaine de celle de Chartres, s’en distingue par l’invention de la rose gothique, mais aussi par son état bien dégradé. Du décor sculpté du XIIème siècle, ne subsiste pratiquement que le zodiaque et les travaux des mois, sur les piédroits de la porte Nord (son cousin chartrain est aussi à la porte septentrionale, mais sur les voussures).
Il ne m’a guère semblé remarquable (mais, encore une fois, une restauration s’impose pour pouvoir en juger vraiment).
Cependant la représentation du signe de la Vierge m’a troublé.


En effet, l’image classique, en tout cas pour un chartrain, est plus proche d’une vierge sage que d’une vierge folle.




(Portail Nord, Portail Ouest et vitrail du zodiaque et des travaux des mois de la cathédrale de Chartres)

Pour tout dire, la Vierge dionysienne m’a irrésistiblement évoqué l’Eve d’Autun (visible au musée Rollin).


L’analogie n’est pas absurde : ne dit-on pas de la Vierge Marie qu’elle est la nouvelle Eve, celle qui a racheté du péché originel l’humanité, que la faute d’Eve avait entraînée dans sa chute ?

A Chartres même, cette nouvelle Eve est clairement représentée. Alors qu’en disant « oui » à l’ange de l’Annonciation, au portail Nord, la Vierge permet la rédemption future de l’Homme, sous ses pieds, le serpent et l’arbre du jardin d’Eden rappellent l’expulsion primitive du Paradis.



Alors, pourquoi ne pas imaginer une volonté consciente du sculpteur médiéval de Saint-Denis, ou de son commanditaire, d’associer encore plus intimement Marie et Eve dans la représentation du signe de la Vierge, dans une époque si friande de symbolisme ?

19:30 Publié dans Sculpture | Lien permanent | Commentaires (2)