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dimanche, 21 mai 2006
Merci
Je me trouvai fort dépourvu, ayant patienté toute une année, lorsque l’été dernier fût venu, en constatant que France Musique – je ne sais plus si le s était alors encore de rigueur – avait abandonné la rediffusion de Comment l’entendez-vous, dont elle avait pris la bonne habitude estivale.
J’avais alors commencé un note pour marquer mon désappointement, et rendre grâce à cette émission, et à sa productrice, Claude Maupomé, qui ont beaucoup contribué à mon éducation musicale. Les choses étant ce qu’elles sont, ce texte est resté à l’état d’ébauche, jusqu’à ce que j’apprenne la disparition récente de Claude Maupomé. On ne peut pas vraiment dire que la radio musicale nationale, en dehors de manifestations individuelles, d’ailleurs fort émouvantes, de quelques animateurs, se soit vraiment préoccupé de célébrer dignement celle qui fait pourtant partie des grandes heures de la station (Y-a-t-il encore de grandes heures sur France Musique ?).
Le temps m’ayant manqué, je n’ai moi-même salué la mémoire de Claude Maupomé qu’à travers un bref écho. Aussi, je voudrais lui rendre un plus conséquent hommage en évoquant en particulier deux émissions qui m’ont particulièrement marqué, en ceci qu’elles m’ont fait découvrir des musiques parmi celles qui me passionnent le plus désormais.
C’était un soir de réveillon du jour de l’an, il y a vingt-cinq ans ; j’étais seul et, m’étant couché avant minuit, j’allumais la radio, calée sur France Musique. Claude Maupomé proposait ce soir là un Comment l’entendez-vous consacré aux madrigaux de Monteverdi, Jean-Patrice Brosse étant l’invité. Ce fut un véritable éblouissement.
Les madrigaux de Monteverdi, cela peut paraître un sujet aride, surtout pour un réveillon. Mais Claude Maupomé y fit preuve des qualités de pédagogie, qui lui étaient habituelles et qui lui faisaient véritablement conduire l’entretien par la pertinence de ses interventions et la grande culture qu’elle y démontrait, mais tout en laissant à son interlocuteur le temps de répondre et de développer son propos.
C’est ainsi que furent abordés, pour autant que je m’en souvienne, l’invention de la monodie accompagnée, puis de l’opéra, les rapports du texte et de la musique, la prima pratica, héritée de la Renaissance, la nouvelle seconda pratica, issue des travaux de la Camerata Bardi, le stile rappresentativo, le stile concitato (le Combat de Tancrède et Clorinde)…
A cette époque, les enregistrements des madrigaux étaient rares, et l’on dût diffuser maintes interprétations de Raymond Leppard et d’Edwin Loehrer (et même de Nadia Boulanger, sauf erreur), que l’on jugeraient plus sévèrement aujourd’hui (quoique…). Mais par delà les défauts des enregistrements, j’ai vraiment découvert une musique et un compositeur qui m’étaient inconnus, et qui me sont aujourd’hui essentiels (et j’y reviendrai ici certainement un jour).
Il est probable que j’aurais fini par rencontrer les madrigaux de Monteverdi, même si je n’avais pas écouté ce Comment l’entendez-vous. En revanche, je ne suis pas certain que le flamenco m’aurait été révélé sans Claude Mapomé et son invité, Michel del Castillo, qui avaient consacré une émission entière au cante jondo (quand ? je ne sais plus, avant 1986 probablement). Dans des domaines musicaux inconnus et complexes, la qualité de l’invité est naturellement primordiale, mais la manière de rendre son discours et ses connaissances accessibles est tout aussi importante, et Claude Maupomé, par sa curiosité et son ouverture d’esprit, savait intéresser l’auditeur à des univers lointains.
La découverte de Pepe de la Matrona, de Terromoto de Jerez, et tant d’autres, fut un véritable ébranlement, et le demeure, car le flamenco, quand le duende est là, est une musique qui provoque sur moi un effet quasiment physique immédiat, comme aucune autre. Il faudra bien d’ailleurs, un jour ou l’autre, que je m’interroge aussi là dessus.
Pour Monteverdi, pour le flamenco, pour tout le reste (Jankelevitch, Levi-Strauss, Massin..), pour vos silences, pour votre grâce et votre élégance, pour votre voix, merci, Claude Maupomé.
J’avais alors commencé un note pour marquer mon désappointement, et rendre grâce à cette émission, et à sa productrice, Claude Maupomé, qui ont beaucoup contribué à mon éducation musicale. Les choses étant ce qu’elles sont, ce texte est resté à l’état d’ébauche, jusqu’à ce que j’apprenne la disparition récente de Claude Maupomé. On ne peut pas vraiment dire que la radio musicale nationale, en dehors de manifestations individuelles, d’ailleurs fort émouvantes, de quelques animateurs, se soit vraiment préoccupé de célébrer dignement celle qui fait pourtant partie des grandes heures de la station (Y-a-t-il encore de grandes heures sur France Musique ?).
Le temps m’ayant manqué, je n’ai moi-même salué la mémoire de Claude Maupomé qu’à travers un bref écho. Aussi, je voudrais lui rendre un plus conséquent hommage en évoquant en particulier deux émissions qui m’ont particulièrement marqué, en ceci qu’elles m’ont fait découvrir des musiques parmi celles qui me passionnent le plus désormais.
C’était un soir de réveillon du jour de l’an, il y a vingt-cinq ans ; j’étais seul et, m’étant couché avant minuit, j’allumais la radio, calée sur France Musique. Claude Maupomé proposait ce soir là un Comment l’entendez-vous consacré aux madrigaux de Monteverdi, Jean-Patrice Brosse étant l’invité. Ce fut un véritable éblouissement.
Les madrigaux de Monteverdi, cela peut paraître un sujet aride, surtout pour un réveillon. Mais Claude Maupomé y fit preuve des qualités de pédagogie, qui lui étaient habituelles et qui lui faisaient véritablement conduire l’entretien par la pertinence de ses interventions et la grande culture qu’elle y démontrait, mais tout en laissant à son interlocuteur le temps de répondre et de développer son propos.
C’est ainsi que furent abordés, pour autant que je m’en souvienne, l’invention de la monodie accompagnée, puis de l’opéra, les rapports du texte et de la musique, la prima pratica, héritée de la Renaissance, la nouvelle seconda pratica, issue des travaux de la Camerata Bardi, le stile rappresentativo, le stile concitato (le Combat de Tancrède et Clorinde)…
A cette époque, les enregistrements des madrigaux étaient rares, et l’on dût diffuser maintes interprétations de Raymond Leppard et d’Edwin Loehrer (et même de Nadia Boulanger, sauf erreur), que l’on jugeraient plus sévèrement aujourd’hui (quoique…). Mais par delà les défauts des enregistrements, j’ai vraiment découvert une musique et un compositeur qui m’étaient inconnus, et qui me sont aujourd’hui essentiels (et j’y reviendrai ici certainement un jour).
Il est probable que j’aurais fini par rencontrer les madrigaux de Monteverdi, même si je n’avais pas écouté ce Comment l’entendez-vous. En revanche, je ne suis pas certain que le flamenco m’aurait été révélé sans Claude Mapomé et son invité, Michel del Castillo, qui avaient consacré une émission entière au cante jondo (quand ? je ne sais plus, avant 1986 probablement). Dans des domaines musicaux inconnus et complexes, la qualité de l’invité est naturellement primordiale, mais la manière de rendre son discours et ses connaissances accessibles est tout aussi importante, et Claude Maupomé, par sa curiosité et son ouverture d’esprit, savait intéresser l’auditeur à des univers lointains.
La découverte de Pepe de la Matrona, de Terromoto de Jerez, et tant d’autres, fut un véritable ébranlement, et le demeure, car le flamenco, quand le duende est là, est une musique qui provoque sur moi un effet quasiment physique immédiat, comme aucune autre. Il faudra bien d’ailleurs, un jour ou l’autre, que je m’interroge aussi là dessus.
Pour Monteverdi, pour le flamenco, pour tout le reste (Jankelevitch, Levi-Strauss, Massin..), pour vos silences, pour votre grâce et votre élégance, pour votre voix, merci, Claude Maupomé.
12:30 Publié dans Musique | Lien permanent | Commentaires (1)
Commentaires
"Vanne Orfeo, felice appieno,
A goder celeste onore
Là ove ben non vien meno
Là ove mai non fu dolore,
Mentr'altari, incensi e voti
Noi t'offriam lieti e devoti."
Écrit par : Stéphane | dimanche, 21 mai 2006