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jeudi, 26 avril 2007

L’œuf et la poule

Ce matin, Claire-Marie Leguay était l’invitée de Lionel Esparza sur France-Musique à l’occasion de la parution d’un disque qu’elle a consacré à des sonates dans la tonalité d’ut mineur de Haydn et Mozart. De façon tout à fait classique, elle a souligné le caractère sombre et profond qui s’attache à cette tonalité (Ut mineur ou la couleur du drame).
Or cette affirmation me semble complètement erronée et relever d'un lieu commun dans le cadre du tempérament égal utilisé quasiment systématiquement en Occident depuis deux siècles et demi.

Vous trouverez ici une page très bien faite qui permet de comprendre ce qu’est un tempérament. En résumé, pour accorder un instrument, il est nécessaire d’altérer les quintes (intervalle de cinq notes) pour conserver la pureté de l’octave (intervalle de huit notes). Comme l’indiquait Bruno Procopio lundi dans la même émission matinale, les compositeurs français des XVIIe et XVIIIe siècles utilisaient des accords qui pouvaient rendre certaines tonalités inutilisables, certaines tierces étant complètement fausses. Aussi, de nombreuses recherches (dont celles du fameux Andreas Werckmeister) ont visé à trouver un accord qui pourraient permettre d’utiliser toutes les tonalités. C’est ainsi que Jean-Sébastien Bach a pu composer son Clavecin bien tempéré.
Toutefois, ces tempéraments restaient inégaux, en ce sens que toutes les quintes et les tierces n’étaient pas altérées de la même façon, ce qui donnaient, effectivement, un caractère spécifique à chaque tonalité.
A partir du moment où l’octave a été divisée en douze demi-tons strictement égaux (le tempérament égal, qui facilite grandement les modulations chères au style classique), il n’y a plus, objectivement, aucune différence entre tonalités (surtout si l’on y ajoute la variable de la hauteur du diapason).

Cependant, il est indéniable qu’il y a une parenté d’atmosphère entre, par exemple, les sonates de Mozart et de Haydn choisies par Claire-Marie Leguay.
Il me semble que nous sommes là devant un phénomène de l'œuf et de la poule, les compositeurs désirant composer une musique de caractère sombre ou profond choisissant la tonalité d’ut mineur plus pour la tradition qui s’y attache que pour les qualités intrinsèques de ladite tonalité.


J’ai profité de l’absence de Zvezdo pour me lancer dans cette tentative de remise en cause d’un lieu commun, mais vous ne le lui répèterez pas, bien sûr.

17:19 Publié dans Musique | Lien permanent | Commentaires (4)

Commentaires

Il va de soit que tout sera répété, rewrité, amplifié auprès de Zvezdo. Ne serait-ce que pour me venger de ne rien comprendre à vos subtilités musicales : NON à l'exclusion, par la culture élitiste bourgeoise, des gros Normands !

Écrit par : Didier Goux | vendredi, 27 avril 2007

Tout cela est parfaitement juste et objectif... cependant, j'entends, moi, une différence, y compris au piano. Si je dis que le mi bémol majeur a une sonorité ronde et le sol majeur une sonorité tranchante, j'ai bien l'impression qu'il y a là une vérification possible.

Tout à fait d'accord aussi pour l'histoire de l'oeuf et de la poule... mais dans le cas d'un lied transposé, dont la couleur change radicalement, cette interprétation n'est pas suffisante.

Écrit par : DavidLeMarrec | dimanche, 29 avril 2007

....Je veux bien qu'il y ait peu de choses en commun entre le fa# mineur de la symphonie des Adieux et celui du mouvement lent du concerto n°x de Mozart. Mais enfin, la glorieuse histoire de ré mineur (don Giovanni, la IXième de van B et Pelléas et Mélisande de A Sch) ce n'est pas un hasard et peu importe de savoir qui est la poule et qui est l'oeuf. Pour le piano, je ne sais pas, mais il me semble évident que faire jouer un violon en mi bémol mineur (ou un cor en fa en fa# majeur) introduit une gène, une tension dont la musique devra forcément rendre compte....

Écrit par : zvezdo | mardi, 01 mai 2007

On ne peut pas dire que le cor soit un instrument à tempérament égal, me semble-t-il.
En tout cas pour un piano bien accordé, la couleur d'une tonalité m'a tout l'air d'être de l'ordre de la subjectivité.

Écrit par : Philippe[s] | mardi, 01 mai 2007